LEASING : TUNISIE VALEURS PORTE UN REGARD MITIGÉ SUR LES PERSPECTIVE DU SECTEUR MAIS ESTIME QU'IL PEUT ÊTRE OPPORTUN DE S'Y POSITIONNER

Ven, 30/06/2017 - 12:47

Tunisie Valeurs consacre une note d'analyse au secteur du leasing, ses réalisations 2016 et ses perspectives. Le secteur s'est bien défendu l'année écoulée, considère Tunisie Valeurs, dans une conjoncture économique au plus bas. Avec 8% de croissance des mises en force, cette évolution – et le contexte le justifie - est trois fois moins importante que pendant les années glorieuses d’avant Révolution (2006-2010) où le secteur faisait prévaloir une croissance annuelle de 25%, indique l'intermédiaire en Bourse.

Tunisie Leasing et Hannibal Lease ont été les locomotives du secteur en 2016. Les deux sociétés ont capturé la totalité de la production « laissée » par l’ancienne Wifeck Leasing, reconvertie en banque fin 2015 et par l’AIL qui connait une baisse de régime importante. Si ce dynamisme paraît anodin pour Hannibal Lease – un challenger qui a habitué le marché par sa vigueur commerciale – il n’en est pas de même pour Tunisie Leasing qui retrouve une de ses plus fortes croissances depuis la Révolution.

Tunisie Valeurs explique la croissance du secteur en 2016 par 3 facteurs :

- La diversion des banques du financement des PME à la fois pour des raisons conjoncturelles d’assèchement de liquidités que pour des raisons opportunistes (afflux vers les bons d’Etat au couple rendement risque plus attractif…et refinançable, de surcroît, auprès de la BCT).

- L’« inflation importée » : le leasing finance majoritairement (75%) du matériel roulant dont les prix ont mécaniquement augmenté avec la dépréciation du Dinar. C’est un effet prix « trompe-l’œil » qui a boosté la valeur de la production et qui sera plus prononcé en 2017 avec la dégringolade de la monnaie;

- Enfin, un regain de dynamisme pour l’activité de BTP (+70% de croissance des mises en force) avec l’accélération de certains marchés publics d’infrastructure, consommateurs de leasing.

Ces trois facteurs ont encore des traces présentes cette année, juge Tunisie Valeurs, et devraient continuer à porter la production de 2017. L'intermédiaire en Bourse pense que les mises en force devraient franchir la barre de 2 milliards de dinars cette année, constituant un record pour le secteur.

En 2017, la marge de leasing sera sous pression en raison de l’augmentation du taux directeur de 75 points de base. En attendant de faire passer cette hausse sur les taux de sortie (pas avant quelques mois selon nous), on devrait assister à un effritement des marges, particulièrement à partir du deuxième semestre. Les sociétés les moins impactées seront celles ayant réussi à faire basculer leurs ressources davantage vers les taux fixes, à leur tête ATL et Tunisie Leasing, selon la note.

Tunisie Valeurs affiche une appréciation mitigée quant aux perspectives du secteur pour 2017. D'un coté, les opportunités résident dans la nature du tissu économique tunisien, constitué en majorité de PME pour lesquelles le leasing est une forme de financement privilégiée (célérité, simplicité, non exigence de fonds propres ni de garanties hypothécaires). Le leasing a prouvé sa capacité à canaliser les ressources vers l’économie réelle (c.à.d les PME) et constitue, à ce titre, un secteur stratégique qui continuera à bénéficier de l’attention des autorités et du soutien des bailleurs de fonds internationaux (BERD, SFI…). Ces derniers assurent aujourd’hui 13% du financement du secteur (deux fois plus qu’il y’a cinq ans)! De plus, le taux de pénétration du leasing en Tunisie (3.5%) est moins élevé qu’au Maroc (4.5%) et totalement décalé par rapport à l’Europe (16%). Il est donc tout à fait légitime d’espérer une consolidation de ce secteur, dans le paysage financier national dans les prochaines années;

De l'autre coté, Tunisie Valeurs voit des facteurs de risque, plutôt liées à l’environnement concurrentiel et la guerre des prix qu’il peut susciter. Les banques sont de plus en plus intéressées par le marché des PME et la nouvelle loi leur a ouvert la voie à l’offre de produits islamiques (parfaits substituts au leasing). Cette menace est sans doute sérieuse mais à long terme à notre avis. D’abord, parce que le manque de liquidité actuel va pousser les banques à rationaliser leurs placements (donc préférence pour le client « Particulier » et le « Trésor »). Ensuite parce que les sociétés de leasing ont pris une longueur d’avance par rapport aux banques et ont développé une grande expertise dans la compréhension des besoins des PME et dans l’évaluation de leur risque.

Malgré la croissance des résultats et les rendements en dividendes alléchants (6,5%), le secteur du leasing demeure boudé en Bourse. La plupart de sociétés traitent à leurs niveaux de fonds propres, ou même moins, alors qu’elles ont pu améliorer leurs fondamentaux dans une conjoncture très difficile. Le secteur souffre d’un problème d’image, accentué par de faibles volumes d’échanges et un déficit de communication de la part des sociétés. La capitalisation boursière de l’ensemble du secteur (470 MDT) est à peine plus grande que celle d’une banque (en l’occurrence l’ATB). A l’échelle individuelle, hormis Tunisie Leasing, la taille moyenne des sociétés de leasing est de l’ordre de 60 millions de dinars.

Bien que la croissance des sociétés de leasing ne semble pas près de renouer avec celle des années 2005-2010, Tunisie Valeurs estime qu’il peut être opportun de s’y  positionner au regard des niveaux de valorisation actuels (P/B de 1,1 contre une moyenne de 1,5 au Maroc).