Les Tunisiens savent depuis longtemps que leur système judiciaire souffre de nombreuses failles. Le Hague Institute for the Internationalisation of Law (HIIL) leur en a apporté la preuve.
En effet, cette organisation vient de rendre public un rapport –remis le 9 mai 2017 à Ghazi Jeribi, ministre de la Justice- intitulé «Besoins judiciaires en Tunisie – 2017: problèmes légaux dans la vie quotidienne», qui analyse les problèmes que le Tunisien rencontre dans sept domaines (accès à l’information et au conseil juridiques, stratégie de résolution des litiges, litiges du travail, besoins de la femme dans le domaine judiciaires, les litiges auxquels les jeunes font face, situation dans le nord-ouest de la Tunisie, la confiance et la maîtrise judiciaire) en rapport avec la justice.
Créée en 2005, avec le soutien du gouvernement néerlandais et la Netherlands Organisation for Scientific Research, HIIL a pour objectif de «mieux comprendre les changements profonds qui ont lieu dans l’environnement dans lequel les systèmes légaux opèrent et, sur cette base, de contribuer concrètement à leur adaptation au monde d’aujourd’hui».
Pour ce faire, HIIL a procédé dans le cas de la Tunisie à un sondage dans le cadre duquel plus de 6.700 Tunisiens ont été interrogés sur «leurs besoins dans le domaine de la justice et sur la manière ils les satisfont, et sur leur degré de satisfaction des résultats qu’ils obtiennent».
De ce sondage il ressort que 4 Tunisiens sur 10 ont affronté un problème juridique grave ou plus au cours des quatre dernières années. Les litiges du travail sont les plus nombreux pour lesquels «le peuple tunisien a besoin de la protection de la loi». 18% de ces conflits ont trait au droit fondamental au travail.
La deuxième catégorie des litiges les plus répandus concerne l’utilisation des services publics. 11% des personnes sondées y ont été confrontées. La troisième catégorie a trait aux litiges avec les voisins (9%).
De ce constat, le rapport tire la conclusion que «les problèmes juridiques que rencontre le peuple tunisien sont non seulement récurrents, mais ont un grand impact aussi». Et que la Tunisie a besoin d’un développement humain et social et de la fourniture d’une prise en charge fondamentale dans le domaine de la justice et à des prix raisonnables».
Le rapport conseille notamment d’«accorder la priorité à la réforme de la justice en fonction des besoins du peuple tunisien». Et comme «il n’est pas possible de tout régler en même temps, en raison de la limite des moyens», HIIL recommande de «se concentrer sur les problèmes les plus répandus (…) et ayant un impact sur la majorité des gens».
Cette opération doit s’appuyer sur «des arguments forts et des théories claires pour changer et chercher en permanence des solutions novatrices». Les auteurs du rapport estiment qu’on peut «atteindre des résultats importants si les parties concernées mettent l’accent sur l’innovation et l’amélioration des procédures dans les domaines de la justice ayant trait au travail et à la famille».
Pour mettre sur pied un «bon système de gestion de ces litiges», le rapport appelle à «construire des alliances pour le changement» regroupant «des organisations et des individus œuvrant à traiter des besoins limités dans le domaine de la justice». Cette manière d’affronter les défis et d’améliorer la situation aura «un impact positif sur le développement économique».